Hier, alors que j'étais perturbée par un problème à mon travail, je sentais que mon esprit commençait à tourner en boucle sur le sujet, avec tous les jugements négatifs qu'il est capable d'inventer dans ces moments-là : "C'est une catastrophe", "Je suis nulle", "C'est de ma faute", "Je n'y arriverai jamais" etc...
Voyant la crise d'angoisse arriver avec ses gros sabots, j'ai profité d'un temps mort pour pratiquer un exercice de méditation d'acceptation des émotions/sensations/sentiments douloureux.
Cet exercice commence par la description de cette émotion. Puis on la re-situe dans le corps. Puis on la "chosifie" (ça fait moins peur). Ensuite, on exprime de la compassion pour cette émotion chosifiée. Puis on se met à la place de cette émotion en se revoyant enfant, pour exprimer de la compassion pour soi enfant (pour son enfant intérieur, diraient certains). Il faut alors lire dans les yeux de cet enfant ce dont il a besoin et le lui apporter.
Et là, un flot de sanglots est remonté directement de mon enfance. "Du réconfort, j'en ai tellement manqué" me suis-je surprise à dire à voix haute.
J'avais déjà eu une petite crise de sanglots à la fin d'un exercice similaire, (celui qui s'intitule "Méditation d'amour et de lien" dans le CD qui accompagne le livre "Méditer jour après jour" de Christophe André) mais beaucoup moins marqué, et ça ne me l'a fait que la première fois que j'ai pratiqué cet exercice.
Je n'avais, à ce jour, aucun souvenir d'avoir manqué de réconfort. J'avais juste remarqué que j'étais mal à l'aise avec ce concept. Soit je refuse le réconfort physique qu'on m'offre (quand quelqu'un me prend dans ses bras, je me crispe), soit le réconfort par la parole me fait fondre en larmes. Le seul réconfort que je m'autorise à rechercher, sans le trouver vraiment, est le réconfort alimentaire, d'où mes problèmes de poids (lire "le trouble du réconfort" de Jean-Philippe Zermati).
Cet événement m'a laissée toute chamboulée pour le reste de la journée. De la tristesse, mais point de crise d'angoisse (c'est déjà ça).
Sur le chemin du retour du travail hier soir, j'ai repensé à tout cela. J'ai compris, je pense, à quelle période de ma vie j'ai fait référence dans cette méditation.
Quand j'étais petite, ma grande-sœur est tombée malade. Ma mère à du s'en occuper durant de longs mois. Elle était hospitalisée loin de la maison, aussi, ma mère à du beaucoup s'absenter. Mon père travaillait et s'occupait de mes deux grand-frères. Et il n'a jamais été très doué avec les enfants petits. J'ai donc été envoyée chez ma tante et chez d'autres gens pendant plusieurs semaines. Pendant cette période, je me suis retrouvée mise à l'écart, un peu abandonnée, pendant qu'un drame se déroulait dans ma famille. J'étais timide et je n'osais pas aller vers les autres. La seule personne qui aurait pu m'apporter du réconfort était ma mère et elle n'était pas disponible pour moi.
Je ne sais pas vraiment si ce vécu est la cause de mes difficultés actuelles avec le réconfort, mais j'imagine que c'est en lien.
Je me suis dit qu'il fallait que je rattrape le temps perdu et que je devais dorénavant m'accorder tout le réconfort dont j'ai besoin et cesser d'être dure avec moi-même. Je mérite le réconfort.
Je me suis aussi dit qu'il fallait que je raconte ça à mon mari, pour qu'il comprenne pourquoi je ne cherche pas à me blottir dans ses bras quand ça ne va pas.
"La compassion envers nous-même c'est notre capacité à accueillir avec douceur ce que nous ressentons et pensons. C'est faire de la place à nos souffrance, tout en souhaitant les voir s'alléger. C'est le geste que nous faisons pour réconforter un enfant qui a mal, pour accueillir avec douceur tant sa douleur que l'expression de sa douleur, sans la juger. C'est le fait de rester disponible et présent à la douleur tout en souhaitant la voir s'apaiser."
Benjamin Schoendorff, "Faire face à la souffrance".
L'exercice en question se trouve ici : Site d'Egide Altenloh, "exercice d'acceptation Russ Harris".